Les rimes. Les strophes. La juxtaposition de ces éléments. Et les discordances, et c'est dans ces discordances que "le poème se lève" (j'emprunte l'expression à Daniel Arrasse, qui disait que "le tableau se lève" quand les éléments interprétatifs s'assemblent et font sens. J'ai voulu aller plus loin que ces deux allusions rapide et ai préparé pour les étudiants un document mis en ligne sur la page du cours, que je reproduis ci-dessous. ******************************** Louise Labé, sonnet XIII Tant que mes yeux pourront larmes espandre, A l'heur passé avec toy regretter: Et qu'aus sanglots et soupirs resister Pourra ma voix, et un peu faire entendre: Tant que ma main pourra les cordes tendre Du mignart Lut, pour tes graces chanter: Tant que l'esprit se voudra contenter De ne vouloir rien fors que toy comprendre: Je ne souhaitte encore point mourir. Mais quand mes yeus je sentiray tarir, Ma voix cassee, et ma main impuissante, Et mon esprit en ce mortel sejour Ne pouvant plus montrer signe d'amante: Prirey la Mort noircir mon plus cler jour.
Louise Labé née Louise Charly en 1524 à Lyon, décédée le 25 avril 1566 à Parcieux-en-Dombes, est une poétesse française. Surnommée « La Belle Cordière », elle fait partie des poètes enactivité à Lyon pendant la Renaissance. Tant que mes yeux pourront larmes épandre A l'heur passé avec toi regretter, Et qu'aux sanglots et soupirs résister Pourra ma voix, et un peufaire entendre; Tant que ma main pourra les cordes tendre Du mignard luth, pour tes grâces chanter; Tant que l'esprit se voudra contenter De ne vouloir rien fors que toicomprendre, Je ne souhaite encore point mourir. Mais, quand mes yeux je sentirai tarir, Ma voix cassée, et ma main impuissante, Et mon esprit en ce mortel séjour Ne pouvant plus montrersigne d'amante, Prierai la mort noircir mon plus clair jour. Tant que mes yeux » est un sonnet écrit par Louise Labé. C'est le sonnet XIV de son texte « Evvres ». Le poème étaitpublié en 1555 dans la période de la Renaissance. Ce sonnet est un poème qui associe la perte d'amour à la mort.
Je vis, je meurs; je me brûle et me noie; J'ai chaud extrême en endurant froidure: La vie m'est et trop molle et trop dure. J'ai grands ennuis entremêlés de joie. Tout à un coup je ris et je larmoie, Et en plaisir maint grief tourment j'endure; Mon bien s'en va, et à jamais il dure; Tout en un coup je sèche et je verdoie. Ainsi Amour inconstamment me mène; Et, quand je pense avoir plus de douleur, Sans y penser je me trouve hors de peine. Puis, quand je crois ma joie être certaine, Et être au haut de mon désiré heur, Il me remet en mon premier malheur. On voit mourir toute chose animée - Louise Labé On voit mourir toute chose animée, Lors que du corps l'âme subtile part. Je suis le corps, toi la meilleure part: Où es-tu donc, ô âme bien-aimée? Ne me laissez par si long temps pâmée, Pour me sauver après viendrais trop tard. Las! ne mets point ton corps en ce hasard: Rends-lui sa part et moitié estimée. Mais fais, Ami, que ne soit dangereuse Cette rencontre et revue amoureuse, L'accompagnant, non de sévérité, Non de rigueur, mais de grâce amiable, Qui doucement me rende ta beauté, Jadis cruelle, à présent favorable.
Le sonnet, ainsi que l'ensemble des œuvres poétiques de Louise Labé, est à lire sur ce site Défense et illustration [1] de l'étude du schéma de la syntaxe et des vers dans ce sonnet. NB: pour l'instant, on ne se concentre que sur la distribution de la syntaxe (la construction des phrases) des rimes. L'étude des thématiques, des références, du sens du texte n'est évidemment pas exclue, c'est vers cela qu'on tend. Mais le sonnet est une forme poétique très contrainte, qui suppose des jeux d'équilibre très subtils en un très petit nombres de vers. Partir de ces contraintes, les démonter, nous permet de voir comment les poètes s'en jouent pour mettre en scène le sens du texte. Répartition des rimes dans les strophes Répartition des phrases dans les strophes Pourra ma voix, et un peu faire entendre: Tant que ma main pourra les cordes tendre De ne vouloir rien fors que toy comprendre: Je ne souhaitte encore point mourir. Mais quand mes yeus je sentiray t arir, Ma voix cassee, et ma main i mpuissante, Ne pouvant plus montrer signe d' amante: Bilan: Quatrains: rimes embrassées (traditionnel) abba abba Tercets: ccd ede.
Analyses Littéraires • Voir l'étude - LABÉ (Louise) LABÉ (Louise) Biographie Nombre de consultations: 3701 FOCUS sur Louise Labé Louise Labé: sa vie, son oeuvre 1 Sujets 2 articles le Jeu 3 Déc 2020 20:22 Sonnets Sonnets et élégies (2) -Ô beaux yeux bruns.... Sonnets et Elégies (8) - Je vis, je meurs... Sonnets et élégies (14) - Tant que mes yeux.. Sonnets et élégies (18) - Baise m'encor.... Sonnets et élégies (20) Prédit me fut... Sonnets et élégies (24) - Ne reprenez, Dames.. 7 Sujets 39 articles le Ven 28 Jan 2022 07:47 Aller à:
les larmes des yeux, la permanence du souvenir de l'aimé dans l'esprit. Le chant se confond donc avec le souvenir, le chant, dans la structure du poème, est inclus dans le souvenir. Ce sonnet illustre un paradoxe crucial dans le cycle poétique de Labé: la perte de l'amour, la plainte amoureuse est la condition de la naissance même de la voix lyrique, fondamentalement élégiaque, donc (voir les trois élégies incluses dans les œuvres complètes). « Le plus grand plaisir après Amour, c'est d'en parler », dit Apollon sous la plume de Labé dans le Dialogue de Folie et Amour qui précède les élégies et les sonnets dans les œuvres complètes; il semble qu'Apollon ait ainsi posé les bases d'un programme de lecture qui donne à lire les sonnets comme l'illustration de la naissance d'une parole poétique. Il faut alors redéfinir la nature de « après Amour »: non tant que le plus intense plaisir soit l'amour, et le second dans l'intensité, la parole. Mais premièrement, dans la chronologie, vient l'amour, puis, ensuite, « après », la parole, le chant.
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